Un parcours d’exécution des peines sans contenu, des cours de promenade livrées à la violence des détenus, un défaut d’encadrement dans la détention : telles sont les constatations du premier rapport sur les prisons du contrôleur général des lieux privatifs de liberté. Jean-Marie Delarue a rendu publiques, mardi 6 janvier, ses recommandations après la visite de son équipe à la maison d’arrêt de Villefranche-sur-Saône. « Nous avons retenu les recommandations qui nous semblent s’appliquer à d’autres établissements que nous avons visités », précise M. Delarue.
S’il décrit la maison d’arrêt de Villefranche comme un établissement neuf, où les détenus « ne sont pas entassés à trois ou quatre dans une cellule », son rapport livre sans détour la réalité de la vie quotidienne en détention. Les cours de promenade sont « les lieux de tous les dangers », « des espaces dépourvus de règles », où « le personnel ne s’introduit jamais ». Elles « sont en quelque sorte abandonnées aux détenus : le plus fort impose sa loi; des blessures graves sont fréquemment constatées; bon nombre de détenus refusent d’aller en promenade, de peur des agressions ». M. Delarue note qu’une « violente rixe » a eu lieu le 31 août 2008, entre une quinzaine de détenus. « La reconquête des cours de promenade, qui ne peut se concevoir que comme un processus de longue haleine, doit être recommandée comme un objectif de l’administration pénitentiaire », préconise le contrôleur général des lieux privatifs de liberté. « La cour doit redevenir ce pourquoi elle est faite : un lieu de promenade, c’est-à-dire de détente », insiste-t-il.
Sa première recommandation concerne l’un des principaux axes de la politique de l’administration pénitentiaireet de la future loi : le parcours d’exécution des peines. A partir de l’expérience menée à Villefranche, M. Delarue constate que « ce parcours consiste à opérer un tri parmi les condamnés en proposant une évolution à certains d’entre eux et en laissant les autres sans espoir d’amélioration de leur sort ». Pour les premiers, le contrôleur relève que le contrat proposé au détenu est « parfois vide de contenu ».
« Colère »
Autre constat : la possibilité de recours des détenus est « insuffisamment développée ». « Les lettres peuvent être ouvertes par celui dont on se plaint », souligne M. Delarue. Les directeurs de prison et leurs adjoints connaissent mal la détention. Les conditions de travail des conseillers d’insertion et de probation « sont difficiles », car ils sont « surchargés de tâches bureaucratiques » et ne peuvent mener à bien leur devoir d’écoute des détenus. « La prise en charge sociale de la plupart des détenus est défaillante aujourd’hui », conclut M. Delarue.
A ses yeux, certains remèdes apportés à des problèmes rencontrés par l’administration pénitentiaire sont pires que le mal. Pour empêcher les jets d’ordures ménagères par les fenêtres, la maison d’arrêt de Villefranche, comme d’autres prisons, ont remplacé les barreaux par des caillebotis qui « ont pour effet de plonger les cellules, dans la journée, dans une quasi-obscurité ». Conséquence : « Ils aggravent la vie cellulaire déjà difficile ou très difficile, attisent les sentiments dépressifs ou de colère. » Le contrôleur demande à l’administration de trouver d’autres solutions.
Article d’Alain Salles paru sur LeMonde.fr le 7 janvier 2009.
La recommandation est disponible sur Légifrance.gouv.fr.
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