Pour décliner son projet de loi, présenté le matin en Conseil des ministres, Rachida Dati visitait Lyon, hier. Avec deux visites au programme. D’abord les maisons d’arrêt des hommes, dans le centre-ville. Une plongée dans ce qui fut baptisé la «Marmite du diable». Une prison vétuste et surpeuplée. Froide et humide l’hiver, d’une chaleur suffocante l’été, et pleine de rats en toutes saisons. Une «école de la récidive», glisse le préfet du Rhône, ex-collègue de la ministre au cabinet de Sarkozy à l’Intérieur. Ensuite, le chantier de la future maison d’arrêt de Corbas, en banlieue lyonnaise. Mal desservie par les transports en commun, elle doit accueillir 540 hommes et 60 femmes, à la fin de l’année. Double balade, pour passer de «la prison d’hier» à celle «du XXIe siècle», plus «douce» selon la ministre…
Hygiaphones. Pour l’instant, cela s’annonce comme un vaste monstre froid. «Tout est fait en béton et en acier, que des matériaux durs», vante le concessionnaire, qui mène la visite. La ministre préfère mettre l’accent sur «la dignité respectée» des détenus. Le vert amande des portes souligne le blanc des couloirs. Les cellules sont un peu plus vastes, avec des cabines comprenant douche, WC et lavabo, derrière une porte façon saloon. Pour prévenir le suicide, le pommeau de douche ne résiste pas au poids d’un humain. Les parloirs sont nombreux et plus grands pour les familles. Certains sont munis d’hygiaphones, pour les détenus en quartier disciplinaire, privés de parloirs auparavant.
La plupart des cellules comportent deux lits, mais la ministre élude les questions liées à l’encellulement individuel, qu’un moratoire repousse (de nouveau) de cinq ans. Elle avise en revanche le local où seront gérés à distance les bracelets électroniques, et saisit l’occasion pour marteler la nécessité d’«imaginer d’autres modes de privation de liberté». D’encourager alternatives à l’incarcération et libérations conditionnelles, qui auraient «doublé en un an». Avec de telles priorités, pourquoi construire 13 200 places de prison ? «Mon principe est simple, répond Rachida Dati. D’abord la sécurité des Français : les personnes qui sont en prison n’y sont pas par hasard. Mais l’aménagement de leurs peines doit permettre de lutter contre la récidive.»
«Baisse». Selon elle, si les prisons débordent, c’est de toute façon la faute à la gauche. «Entre 1997 et 2002, martèle-t-elle, le nombre de places a baissé de 4 % en prison, alors que la délinquance explosait. Aujourd’hui, la délinquance baisse et l’on construit des prisons.» Pour conclure, elle assène devant quelques magistrats : «Il n’y a pas eu de politique pénale pendant des années.» Aujourd’hui, grâce à Rachida Dati, il y aurait «une politique pénale unique, et appliquée». Amabilité qui réjouira Dominique Perben et Pascal Clément, les deux derniers ministres (UMP) de la Justice.
Article d’Olivier Bertrand paru sur LibéLyon.fr le 29 juillet 2008.
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