Archive pour août 2008

L’exécution des décisions en matière pénale en Europe, du visible à l’invisible

Samedi 30 août 2008

Colloque international organisé à Lyon par la Direction de l’administration pénitentiaire, mardi 16 décembre 2008. 

Les temps et les hommes

9h -10h15 : propos liminaires
- Les exigences européennes et leur application, Rob Allen, King’s College, Grande-Bretagne.
- Les exigences de l’opinion publique en matière pénale, Denis Salas, magistrat.

10h30 – 12h30 : tables rondes

- L’émergence d’une professionnalisation de l’exécution des peines,  animée par Leo Tigges, Organisation européenne de la probation, Pays-Bas.
- Les décisions en matière pénale doivent-elles être négociées, imposées, acceptées ? animée par Jose-Luis de la Cuesta, Université San Sebastian, Espagne.

- Peut-on évaluer l’efficacité des mesures pénales en fonction de la durée de la sanction ?, animée par Sonia Snacken, Université de Bruxelles, présidente du Conseil de coopération pénologique, Belgique.

Les temps et les lieux

14h15 – 15h30 : propos liminaires

- Les lieux d’incarcération,  Philippe Combessie, Université Paris 10, Nanterre.
- Pour une approche technique et technologique, Jean-Charles Froment, Université Grenoble 2.

15 h 45-17 h 45 : tables rondes

- L’importance de la dignité en tout lieu, animée par Annie Beziz, Université Lyon 3.

- Les nouvelles technologies et le contrôle : vers une disparition de la prison ?, animée par Jean-Charles Froment, Université Grenoble 2, France.

- Efficacité et coût, la question de l’évaluation, animée par Jérôme Filippini, avocat général près la Cour des comptes.

18 h-18 h 30 : conclusions, synthèse des échanges

Allocution de Claude d’Harcourt, préfet, directeur de l’administration pénitentiaire.

* Contact :  colloquelyon@justice.fr

Source : ACP n° 98-99, septembre 2008.

Un pigeon « arrêté » pour avoir fourni de la drogue à des détenus en Bosnie

Vendredi 22 août 2008

SARAJEVO, 21 août 2008 (A.F.P.) – La police bosniaque a capturé un pigeon après avoir découvert que des détenus l’utilisaient pour introduire de la drogue à l’intérieur d’une des principales prisons de haute sécurité de Bosnie, a-t-on appris jeudi de source pénitentiaire.

 

« Les gardiens ont soupçonné l’animal d’être impliqué dans un trafic de drogue après avoir noté que quatre détenus s’étaient visiblement drogués peu après que le pigeon se fut posé à une fenêtre de la prison », a déclaré à l’A.F.P. un responsable pénitentiaire, Josip Pojavnik.

 

Après des analyses médicales, il s’est avéré que les quatre détenus avaient effectivement pris de l’héroïne, a ajouté ce responsable de la prison de Zenica, précisant que des mesures disciplinaires allaient être prises à leur encontre.

 

Selon lui, la drogue était transportée dans de petits sachets accrochés aux pattes de ce pigeon voyageur, officiellement accepté par l’administration pénitentiaire comme animal de compagnie d’un des détenus.

 

« Nous pensons que le pigeon transportait la drogue depuis Tuzla », une localité à environ 70 km au nord-est de Zenica, dans le centre de la Bosnie, a expliqué M. Pojavnik.

 

 

L’oiseau a été placé en garde à vue par la police, qui a lancé une enquête pour identifier ceux qui le « fournissaient » en drogue. « Nous ne savons pas quoi faire du pigeon », a avoué le responsable pénitentiaire, « mais pour l’instant il va rester derrière les barreaux ».

 

A la suite de cet incident, l’administration de l’établissement envisage de mettre fin à un projet d’élevage de pigeons mis en place dans le cadre du programme de réhabilitation des détenus, bien que l’oiseau incriminé n’en soit pas issu.

 

Un cas similaire a été découvert cette année dans une prison brésilienne, où des pigeons voyageurs étaient utilisés pour transporter de la drogue mais aussi des téléphones portables.

Sortir de prison en permission

Lundi 4 août 2008

L’article 723-3 du code de procédure pénale (CPP) stipule que « La permission de sortir autorise un condamné à s’absenter d’un établissement pénitentiaire pendant une période de temps déterminée qui s’impute sur la durée de la peine en cours d’exécution. Elle a pour objet de préparer la réinsertion professionnelle ou sociale du condamné, de maintenir ses liens familiaux ou de lui permettre d’accomplir une obligation exigeant sa présence. » Concrètement, en 2007, 53 511 permissions de sortir ont été accordées (Source : chiffres-clés de la Justice 2008). Ce chiffre peut paraître important, mais, outre qu’il est présenté comme une « valeur estimée », il masque surtout une réalité très contrastée.

 

Les permissions de sortir d’une journée peuvent être accordées aux personnes condamnées à des peines inférieures à 5 ans pour, par exemple, passer un examen, rencontrer un futur employeur dans la perspective d’une libération conditionnelle, se rendre à une consultation médicale, ou encore, depuis un décret du 16 novembre 2007, exercer son droit de vote. Les permissions, également d’une journée, placées sur les samedis, dimanches, jours fériés ou chômés, sont réservées aux personnes en semi-liberté, en placement extérieur ou sous surveillance électronique (fixe). Des permissions de sortir de 3 jours au maximum sont accordées pour le maintien des liens familiaux ou en vue de la réintégration, à condition d’avoir exécuté la moitié de la peine (le 1/3 pour les personnes incarcérées en CD, les 2/3 pour les personnes en situation de récidive) et qu’il reste moins de 3 ans, et sans condition de délai pour les peines de moins d’1 an. Pour les personnes incarcérées en CD, la durée de la permission peut être portée à 5 jours, voire 10 jours une fois par an. Ces différentes dispositions ne s’appliquent pas durant la période de sûreté, lorsqu’une telle peine a été prononcée. En outre, durant la permission, la personne peut être soumise à des obligations ou à des interdictions imposées par le juge de l’application des peines (JAP). Enfin, les permissions de sortir sont discrétionnaires et cela induit par nature des disparités selon le JAP, ou le tribunal de l’application des peines, qui prend la décision. Cet aspect discrétionnaire porte également sur la fréquence des permissions qui n’est pas fixée par la loi. Elle résulte d’un usage, mais celui-ci peut varier d’un établissement à un autre. Il est souvent constaté que les permissions de sortir ont rarement une fréquence supérieure à 1 par mois pour les personnes condamnées à de longues peines.

 

Il ressort de cette réglementation que, pour certaines personnes, il n’y a de possibilité de sortir en permission qu’à la toute fin de leur peine (et encore), alors que cette modalité permet de garder un contact avec l’extérieur, ce qui favorise la réintégration dans la communauté au moment de la sortie. La fin de la peine arrive parfois après de nombreuses années de prison et comment ne pas imaginer le décalage vécue par les personnes, après 10 ans, 20 ans, ou plus, passés derrière les murs ? Il n’est pas rare que des personnes ne puissent pas quitter l’établissement alors que leur présence auprès d’un parent malade serait nécessaire ou bien que la mort d’un parent proche justifierait amplement leur présence au sein de la famille. Certes, l’article 723-6 du CPP précise que « Tout condamné peut, dans les conditions de l’article 712-5 [c’est-à-dire décision prise, sauf exception, après avis de la commission de l’application des peines] obtenir, à titre exceptionnel, une autorisation de sortie sous escorte », mais cette disposition n’est pas toujours mise en application. Que penser de la façon dont est vécue l’interdiction de sortir, trop souvent formulée à l’occasion de la mort d’un proche ? En outre, les conditions de la sortie sous escorte (personnel éventuellement en uniforme, usage possible des menottes) ne sont pas toujours heureuses eu égard aux circonstances qui motivent la sortie, s’il s’agit de circonstances familiales.

 

Des permissions de sortir devraient pouvoir être accordées dès le début de la peine. Le fait qu’il existe des règles relatives à l’exécution du tiers ou de la moitié de la peine selon la nature de l’établissement d’incarcération est, d’une certaine manière, contraire au principe d’individualisation. Le fait de bénéficier de permissions de sortir ne devrait pas être une condition d’irrecevabilité pour une demande d’accès à une unité de vie familiale (lorsque l’établissement en est doté), ce qui est actuellement le cas. Les permissions de sortir sont une façon de retisser des liens avec le monde extérieur, liens que l’enfermement distend chaque jour un peu plus. Présenté ainsi, ce fonctionnement est presque paradoxal : on enferme et on laisse sortir avec une extrême parcimonie pour tenter de réparer quelques uns des effets délétères de la prison.

 

Communiqué de la rédaction de Ban Public en Août 2008.

Centre Pénitentiaire de Saint-Quentin-Fallavier: la famille d’un détenu tenue dans l’ignorance de sa tentative de suicide et de son hospitalisation dans un état critique

Lundi 4 août 2008

La section française de l’Observatoire international des prisons informe des faits suivants:
Les proches d’un détenu de 23 ans incarcéré au centre pénitentiaire de Saint-Quentin Fallavier (Isère) ont appris fortuitement en se rendant au parloir que celui-ci avait été hospitalisé trois jours plus tôt dans un état critique. La réglementation prévoit pourtant une information immédiate de la famille dans ces circonstances.
A la suite d’une tentative de suicide par ingestion médicamenteuse, dans la nuit du 14 au 15 juin, F.M. est transporté dans le coma au service médical intensif du centre hospitalier Lyon-Sud. Souffrant d’une embolie pulmonaire provoquée par l’acte auto-agressif, celui-ci sera ensuite hospitalisé 10 jours au sein de l’unité hospitalière sécurisée interrégionale (UHSI) de Lyon. Ce n’est qu’en se rendant à l’établissement le 17 juin, afin de réserver un parloir, que la grand-mère de F.M. a été informée de l’hospitalisation de son petit-fils par un membre du personnel. Celle-ci ne parvenant pas à obtenir d’informations sur les raisons, la date et le lieu d’hospitalisation, les parents de F.M. ont tenté, en vain, de joindre le centre pénitentiaire et le service social, avant d’appeler par déduction le centre hospitalier Lyon-Sud, et d’obtenir, après plusieurs coups de téléphone, confirmation de la présence de leur fils au sein de l’hôpital.
Interrogée par l’OIP le 25 juillet 2008 sur les raisons de ce dysfonctionnement, la direction de l’établissement justifie l’absence d’information de la famille par le fait qu’en cas de tentative de suicide celle-ci « dépend de la gravité de l’acte », et qu’en l’occurrence, elle n’a pas souvenir «  de tentative de suicide très inquiétante au cours des derniers mois ». Elle a, en outre, indiqué que « l’alerte ne relève pas de la responsabilité du chef d’établissement mais incombe au juge d’instruction lorsque la personne ayant tenté de mettre fin à ses jours n’est pas condamnée ». En l’espèce, le magistrat instructeur, et l’avocate du jeune homme n’ont été avertis par la direction de l’établissement de la situation de F.M que le 17 juin, par télécopie, après que la famille a été informée par le service des parloirs. Le magistrat a signalé à la direction interrégionale des services pénitentiaires (DISP) de Lyon la tardiveté avec laquelle il a été informé de la situation de F.M. Selon ce dernier, la DISP « a reconnu le dysfonctionnement et s’en est excusée ».

L’OIP rappelle :

  • l’article D 427 du Code de procédure pénale disposant qu’ « Au cas où un détenu vient à décéder, à être frappé d’une maladie mettant ses jours en danger, ou victime d’un accident grave, ou à être placé dans un établissement psychiatrique, sa proche famille doit en être immédiatement informée ».

  • la circulaire de l’administration pénitentiaire du 12 mai 1981 relative à l’amélioration des relations entre l’administration et les proches d’un détenu malade ou décédé précisant qu ‘ « il conviendra de choisir à chaque fois le mode de communication propre à assurer la diffusion la plus rapide de la nouvelle, en fonction de son urgence et de sa gravité, quitte à distinguer une information immédiate, même concise, et une information complémentaire ultérieure plus développée » et que l’information « doit toujours relever de la responsabilité directe du chef d’établissement (y compris quand le détenu est hospitalisé en milieu extérieur), qui doit se faire tenir informé sur le champ de tout événement grave et prendre lui-même les mesures qui s’imposent, en veillant avec soin à leur correcte exécution. »

  • la règle pénitentiaire européenne n°24-9: « En cas de transfèrement dans un hôpital, les autorités doivent informer immédiatement son conjoint ou son compagnon ou bien, si l’intéressé est célibataire, le parent le plus proche et toute autre personne préalablement désignée par le détenu ».


Pour confirmation : Céline Reimeringer (06 50 73 29 04)

Communiqué de l’OIP le 04 août 2008.

A Lyon, Dati passe de la «Marmite du diable» à la prison du XXIe siècle

Vendredi 1 août 2008

Pour décliner son projet de loi, présenté le matin en Conseil des ministres, Rachida Dati visitait Lyon, hier. Avec deux visites au programme. D’abord les maisons d’arrêt des hommes, dans le centre-ville. Une plongée dans ce qui fut baptisé la «Marmite du diable». Une prison vétuste et surpeuplée. Froide et humide l’hiver, d’une chaleur suffocante l’été, et pleine de rats en toutes saisons. Une «école de la récidive», glisse le préfet du Rhône, ex-collègue de la ministre au cabinet de Sarkozy à l’Intérieur. Ensuite, le chantier de la future maison d’arrêt de Corbas, en banlieue lyonnaise. Mal desservie par les transports en commun, elle doit accueillir 540 hommes et 60 femmes, à la fin de l’année. Double balade, pour passer de «la prison d’hier» à celle «du XXIe siècle», plus «douce» selon la ministre…

Hygiaphones. Pour l’instant, cela s’annonce comme un vaste monstre froid. «Tout est fait en béton et en acier, que des matériaux durs», vante le concessionnaire, qui mène la visite. La ministre préfère mettre l’accent sur «la dignité respectée» des détenus. Le vert amande des portes souligne le blanc des couloirs. Les cellules sont un peu plus vastes, avec des cabines comprenant douche, WC et lavabo, derrière une porte façon saloon. Pour prévenir le suicide, le pommeau de douche ne résiste pas au poids d’un humain. Les parloirs sont nombreux et plus grands pour les familles. Certains sont munis d’hygiaphones, pour les détenus en quartier disciplinaire, privés de parloirs auparavant.

 

La plupart des cellules comportent deux lits, mais la ministre élude les questions liées à l’encellulement individuel, qu’un moratoire repousse (de nouveau) de cinq ans. Elle avise en revanche le local où seront gérés à distance les bracelets électroniques, et saisit l’occasion pour marteler la nécessité d’«imaginer d’autres modes de privation de liberté». D’encourager alternatives à l’incarcération et libérations conditionnelles, qui auraient «doublé en un an». Avec de telles priorités, pourquoi construire 13 200 places de prison ? «Mon principe est simple, répond Rachida Dati. D’abord la sécurité des Français : les personnes qui sont en prison n’y sont pas par hasard. Mais l’aménagement de leurs peines doit permettre de lutter contre la récidive.»

 

«Baisse». Selon elle, si les prisons débordent, c’est de toute façon la faute à la gauche. «Entre 1997 et 2002, martèle-t-elle, le nombre de places a baissé de 4 % en prison, alors que la délinquance explosait. Aujourd’hui, la délinquance baisse et l’on construit des prisons.» Pour conclure, elle assène devant quelques magistrats : «Il n’y a pas eu de politique pénale pendant des années.» Aujourd’hui, grâce à Rachida Dati, il y aurait «une politique pénale unique, et appliquée».  Amabilité qui réjouira Dominique Perben et Pascal Clément, les deux derniers ministres (UMP) de la Justice.

 

Article d’Olivier Bertrand paru sur LibéLyon.fr le 29 juillet 2008.